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L’UER ou la diplomatie par les ondes Featured

May 1st, 2023
Véronique Stenger

Il existe plusieurs manières de raconter l’histoire de l’Union européenne de radio-télévision (UER), tant les sources qui lui sont liées sont riches et variées. L’histoire de l’UER, qui est la plus grande alliance de médias de service public au monde, se mêle à celle des médias en Suisse et en Europe, mais aussi des innovations technologiques et de la coopération internationale dans le domaine des communications, un sujet que geneveMonde.ch vous fait découvrir dans ce dossier.

Construire une Europe des médias audiovisuels

En 1950, les radiodiffuseurs de toute l'Europe occidentale se réunissent à Torquay, une ville balnéaire du Royaume-Uni, pour fonder l'Union européenne de radio-télévision (UER), dont le siège se situe à Genève (1). Cette organisation compte parmi ses membres fondateurs les principaux médias européens, à l’exception de l’Allemagne et de l’Autriche et des pays du bloc communiste, ces derniers s’étant regroupés pour former, dès 1946 à Prague, l'Organisation internationale de radiodiffusion et de télévision (OIRT). Mais l’Europe audiovisuelle qui se dessine après la guerre avec l’UER dépasse largement les frontières de l’Europe géographique. De fait, toute organisation de radiodiffusion peut devenir membre de l’UER, pour autant qu’elle bénéficie d’une autorisation gouvernementale d'exploiter un service de radiodiffusion à partir d'émetteurs permanents et qu’elle appartienne à un pays membre de l’Union internationale de télécommunications (UIT), dont le siège est également à Genève. Aujourd'hui 56 pays sont représentés à l'UER.

Aujourd’hui, l’UER met à disposition quotidiennement près de 14 heures d'actualités de direct et plus de 40'000 sujets sur l'actualité, notamment sportive.

La mission confiée à l’UER en 1950 est de coordonner les efforts de radiodiffusion. Selon ses statuts, l’UER doit encourager le développement des collaborations entre les organismes de radiodiffusion ; promouvoir le développement de la radiodiffusion sous toutes ses formes ; arbitrer sur le plan international les conflits et faire respecter par tous ses membres les dispositions des accords internationaux relatifs à tous les aspects de la radiodiffusion. Dit autrement, l’UER doit favoriser les échanges, arbitrer les désaccords sur les technologies, et contribuer à forger une nouvelle vision pour l’Europe après la guerre. Aujourd’hui, l’UER met à disposition quotidiennement près de 14 heures d'actualités de direct et plus de 40'000 sujets sur l'actualité, notamment sportive. Chaque année environ 3000 concerts sont mis à disposition des membres de l’UER, ce qui en fait le plus grand échange musical au monde (2).

Un projet ancien d’union internationale

Si la création de l’UER date de l’après-Seconde Guerre mondiale, le projet d’union internationale de radiodiffusion qu’elle incarne, lui est plus ancien. Dès la fin du XIXe siècle, période qui voit émerger de nouvelles innovations technologiques de communication, tels que le téléphone et la radio, naît le besoin d’adopter des règles communes entre les États pour le développement, l’usage et l’exploitation des communications. Les premières organisations internationales, telles que l’Union télégraphique internationale, fondée à Paris en 1865, et l’Union postale universelle fondée en 1874 à Berne, sont d’ailleurs nées de ces préoccupations.

Au début du XXe siècle, alors que l’Europe est littéralement noyée sous les ondes, le besoin d’organiser le partage des fréquences entre les différentes stations de radio mobilise les gouvernements.

La coopération internationale n’aurait pas pu, de toute évidence, se développer sans les moyens de communications. Au début du XXe siècle, alors que l’Europe est littéralement noyée sous les ondes, le besoin d’organiser le partage des fréquences entre les différentes stations de radio mobilise les gouvernements, d’autant plus que ses usages se sont diversifiés. Mais avec la fin de la Première Guerre Mondiale et la création de la Société des Nations, la communication doit aussi servir la paix et la coopération internationale et permettre ainsi de nouvelles opportunités commerciales et culturelles. Le fait que la Société des Nations crée sa propre station en 1932 - Radio Nations au Palais des Nations à Genève - contribue encore davantage à en faire un outil au service de la coopération internationale (3). Pour répondre à ces divers besoins, en 1925 est créée à Genève l’Union internationale de Radiophonie, dont l’UER est l’héritière (4). La Suisse, à travers la Société suisse de radiodiffusion (SSR), fondée en 1931, participe à la création de l’UIR et au développement de ses activités (5).

Une ambition européenne jamais réalisée

Entre 1925 et 1938, l’UIR fonctionne comme un centre d'échange international de radiodiffusion en Europe mais, compromise par les nazis, elle ressort affaiblie de la Seconde Guerre mondiale. En 1950, l’UIR fait donc peau neuve et devient l’UER, et se dote d’une ambition européenne affirmée.

Les médias suisses ont largement contribué à porter ce message européen, à travers notamment la voix de Marcel Bezençon

Dans le contexte d’après-guerre et de démarrage de la construction européenne, l’UER est en effet appelée, au même titre que d’autres institutions naissantes, à servir la construction européenne. La radio, mais aussi la télévision de service public, doivent favoriser la paix, la prospérité et l’éducation européenne des citoyens. Les médias suisses ont largement contribué à porter ce message européen, à travers notamment la voix de Marcel Bezençon, membre fondateur de l’UER, qu’il préside de 1971 à 1972, et directeur général de la SSR de 1950 à 1972.

Marcel Bezençon a également initié les projets de l’Eurovision en 1954 et de la Rose d’Or de Montreux en 1961. Les programmes culturels européens et internationaux mais aussi sportifs, comme Eurosport, comptent parmi les principaux instruments de la politique européenne de l’UER depuis les années 1950 et bénéficient aujourd'hui d'une audience considérable (7). En 1985, cinq radiodiffuseurs publics européens ambitionnent de créer une chaîne européenne de télévision, Europa TV, première chaîne de télévision multilingue pour l'Europe (8). Mais tout comme la chaîne Euronews, créée en 1993, ces projets de chaîne européenne n'ont jamais connu le succès attendu (9).

L’impact européen de l’UER reste difficile à estimer. Si le grand projet fondateur de coopération audiovisuelle européenne ne s’est jamais pleinement réalisé, du fait des obstacles culturels, de la difficulté à cerner les « sujets européens » ou encore des collaborations difficiles entre des chaînes de télévisions de service public dont l’ancrage reste avant tout national, l’UER en tant que l’une des plus importantes associations professionnelles de radiodiffuseurs nationaux dans le monde, a sans aucun doute contribué à la construction de l’Europe des médias audiovisuels (10).

Véronique Stenger pour geneveMonde

Légende photo: Europa TV Cover. EU Screen Blog.

Références :

  1. Russell B. Barber (1962). "The European broadcasting union", Journal of Broadcasting, 6(2), pp. 111-124.
  2. Merci à Sybille Tornay, porte-parole de la direction générale de la SSR, pour cette information.
  3. Pierre-Etienne Bourneuf. Genève, berceau de la Société des Nations. Genève, Nations Unies, 2022, pp. 82-85.
  4. Patrick Alves. « L'Union Européenne de Radiodiffusion, 1950-1969. Une approche internationale et communautaire de la télévision », Bulletin de l'Institut Pierre Renouvin, vol. 26, no. 2, 2007, pp. 19-34.
  5. Sur l'histoire de la SSR voir https://www.srgssr.ch/fr/qui-nous-sommes/lhistoire-de-la-ssr/chronique-de-la-ssr-depuis-1931. Le Suisse Alfred Glogg, président de la SSR devient le deuxième président de l'UIR en 1941 et succède à Arthur Burrows, premier directeur des programmes de la BBC. https://genevemonde.ch/entries/QdJ1wbdK5Yn
  6. Sur l'Eurovision de la chanson et le Groupe eurosonic voir les interviews de Dave Goodman, Laurent Marceau et Jean-Marc Richard réalisées par geneveMonde.
  7. https://blog.euscreen.eu/2018/11/europa-tv-the-european-broadcasting-dream/
  8. Tobias Theiler (1999). "Viewers into Europeans?: How the European Union Tried to Europeanize the Audiovisual Sector, and Why it Failed". Canadian Journal of Communication. 24 (4), pp. 1–30.
  9. Olivier Baisnée and Dominique Marchetti (2000). "Euronews, un laboratoire de la production de l’information « européenne »", Cultures & Conflits [Online], 38-39 |. Online since 13 March 2006, connection on 28 April 2023. URL: journals.openedition.org/confl...; DOI: doi.org/10.4000/conflits.283
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May 17th, 2023
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